Assemblage du récit et photos avec l'aimable autorisation de l'auteur F5LBD

 

Suite du récit

Une vie, une Passion

Michel F5LBD

 

LA TÉLÉGRAPHIE CW À L’ARMÉE IL Y A 50 ANS

(Suite de souvenirs de radiotélégraphie)

 

Si la télégraphie CW a été abandonnée par les administrations de plusieurs pays (pas tous) depuis plusieurs années, il y a 50 ans, en 1959, elle était encore omniprésente sur les ondes courtes.

La CW était beaucoup utilisée par les pays du monde entier. Aujourd’hui, en 2009, il y a encore les radioamateurs qui l’utilisent, et encore, et de loin, pas tous !

Aussi, au fur et à mesure que les derniers utilisateurs radioamateurs de ce Mode disparaissent, il faut se rendre à l’évidence que nous serons de moins en moins nombreux de radiotélégraphistes (capable surtout), à utiliser ce Mode.

Il y a bien quelques nouveaux volontaires radioamateurs qui désirent apprendre la CW et qui ont la volonté de persister, de ne pas abandonner au premier échec, à la première difficulté. C’est pourquoi, je pense, qu’il est pour ainsi dire de notre devoir à nous les radioamateurs radiotélégraphistes de les aider, si nous voulons que ce Mode perdure.

Trafiquer, c’est bien ! Mais si nous pouvons trafiquer et aider, chacun dans notre coin, c’est mieux. Si l’on peut seulement aider, à cause de l’âge, la fatigue, c’est encore bien aussi.

 Quant à l’Armée, après avoir abandonné (si nous en croyons la rumeur) le  Morse, comme les autres administrations il y a quelques années, d’après les dernières informations, l’Armée formerait toujours des radiotélégraphistes à l’heure actuelle. Ces radiotélégraphistes pourraient être un vivier de radioamateurs radiotélégraphistes, certes moins important qu’auparavant, lorsqu’ils seront à la retraite ou non, mais c’est bien aussi.

Le Mode CW restera, je pense, l’ultime recours en cas de conflit qui détruirait ou rendrait inutilisables les moyens de télécommunications actuels : satellitaires, filaires, Internet.. Je crois que les autorités en sont conscientes. Les moyens que nous utilisions dans les années 50 et 60, nos méthodes de travail, peuvent faire sourire et paraître bien insolites pour nos successeurs qui utilisent aujourd’hui l’Informatique pour les télécommunications.

 

 L’EXPLOITATION DE LA CW EN 1950

A l’exploitation (émission et réception de la CW) en 1950, les récepteurs de l’époque étaient loin d’être aussi performants et sélectifs que ceux d’aujourd’hui. La largeur de bande des récepteurs était telle, que nous captions beaucoup d’interférences, d’autres brouillages CW, impossible à éliminer.

Le cerveau humain avait beaucoup à trier, à travailler, pour sortir parfois un message du QRM.

C’est pourquoi, toujours à cette époque, il était fait une grande distinction entre la lecture au son en salle de cours, et la lecture de la CW en trafic réel sur les ondes.

Un bon lecteur en salle de cours, n’était pas automatiquement un bon lecteur sur les ondes, c’était à nouveau tout un autre apprentissage pour être aussi bon lecteur sur les ondes qu’en salle, car bien plus difficile à cause des dits QRM. Parfois, on incluait un QRM en salle de cours, mais çà ne valait pas le trafic en réel.

 

 LA MÉTHODE DE TRAVAIL 

Notre méthode de travail consistait à écrire les messages en langage clair sur un carnet de feuilles détachables en papier fin, genre pelures. Carnet sur lequel, selon les desiderata des autorités, il fallait écrire le message en plusieurs exemplaires en intercalant des feuilles de papier carbone pour l’écriture à la main (carbones de couleur bleu Kores pour l’écriture à la main, les carbones noir Kores étant pour les machines à écrire mécanique, cette précision pour les lecteurs qui n’ont pas connu cela).

Pour l’interception des messages chiffrés, nous les écrivions sur d’autres imprimés et, souvent, ils étaient obligatoirement collationnés, répétés vers l’expéditeur afin qu’ils soient correctement interceptés.

 

LES CONTRÔLES DE LA CW EN 1960 

Aux contrôles en 1960 (Réception uniquement de la CW), il y avait eu des progrès pour les récepteurs par rapport au début des années 50 avec les BC-312 et BC-342 et autres récepteurs). En 1960, la bande passante était un peu moins large, avec moins de QRM, mais encore une fois c’était loin d’égaler les récepteurs de trafic d’aujourd’hui. De plus, l’affichage de la fréquence était toujours aussi imprécis qu’auparavant. Cependant, sur les récepteurs AME par exemple, de gros progrès avaient été faits pour la bande passante et autres sélecteurs d’améliorations pour recevoir une station.

BC-342

BC-312

 

Lorsque je suis arrivé dans un Centre de contrôles en 1959, dans les forces françaises en Allemagne, nous étions toujours équipés de récepteurs avec affichage approximatif de la fréquence. Si un opérateur envoyait une fréquence approximative pour localiser un émetteur, même en transmettant la modulation, les résultats n’étaient pas toujours concluants lorsque l’émission était de courte durée.

Pour travailler avec des résultats de localisation, il fallait mesurer la fréquence avec le fréquencemètre SCR 211 avant tout envoi de modulation, commentaires etc.. Mais c’était une perte de temps, préjudiciable aussi à la localisation. Le mieux était d’étalonner les réglages de toutes les fréquences des récepteurs avec le fréquencemètre. Le réglage de chaque fréquence (au kHz) était reporté sur un tableau pour chaque récepteur. (innovation d’opérateur ou système D pardi !..) 

BC-221

BC-221

On pouvait aussi calculer les réglages en appliquant une règle de trois, mais, après une cinquantaine de kHz, cela devenait moins précis que l’utilisation du fréquencemètre. C’était donc un travail long et fastidieux, réalisable à condition que le trafic ne soit pas trop important en quantité.

La transcription des messages interceptés se faisait bien sûr, toujours écrite à la main sur un imprimé spécial auquel était adjoint trois feuilles de papier pelure avec un carbone intercalé entre chaque exemplaire. Le tout, une fois assemblé, était fixé provisoirement en haut de l’imprimé à l’aide de deux trombones. Le stylo bic était proscrit, nous devions écrire uniquement avec des crayons. Si on ne voulait pas tomber en panne, il fallait se constituer une réserve de crayons taillés à l’avance, ainsi qu’une certaine quantité d’imprimés prêts avec les carbones. Il fallait appuyer suffisamment sur le crayon pour que le quatrième exemplaire du message, ou du PV soit lisible. Il ne fallait pas trop appuyer, afin que la mine ne se casse pas ! Alors, ce n’était pas aussi si simple qu’il peut sembler.

Après quelques temps, j’ai fait l’acquisition de crayons critériums, la mine durait plus longtemps et c’était facile de la sortir au fur et à mesure de son usure. L’utilisation du stylo bic fut enfin acceptée vers 1962, c’était assurément beaucoup plus pratique que tous les crayons ou critériums.

Enfin, entre les années 70 et 80, après mon retour en métropole dans un autre Centre de contrôles, nous avons été dotés de récepteurs avec affichage précis de la fréquence et autres améliorations de largeur de bande passante. Une facilité d’emploi, un gain de temps et une réelle efficacité, par  rapport à tout ce que nous avions connu jusqu’à ce moment.

Tout cela est bien du passé, c’était il y a 50 ans, et bien loin des méthodes de travail d’aujourd’hui avec l’informatique. Mais je suppose que l’opérateur doit reprendre à l’oreille et à la main (Il doit encore savoir lire le Morse audio), en cas de mauvaises données ? Il faut, je crois, toujours un opérateur sachant lire du Morse ? Je laisse le clavier à un ami qui pourrait l’expliquer, autant qu’il en soit autorisé sans trahir de secret ? Car moi j’ai quitté ‘les grandes oreilles’ en 1982.

Expliquer, tout en restant dans des généralités comme toujours.

 Michel F5LBD

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